Recours contre la Cena : la Cour déclare irrecevable la plainte sur l’autoparrainage

Saisie d’un recours introduit par quatre citoyens béninois contre la Commission électorale nationale autonome (CENA) et le directeur général des élections (DGE), la Cour constitutionnelle a rendu, ce jeudi 9 octobre 2025, sa décision dans l’affaire relative à la polémique sur l’autoparrainage. La haute juridiction a jugé le recours irrecevable, estimant qu’il ne relevait ni du contentieux électoral ni d’une violation constitutionnelle.
Une plainte fondée sur l’article 132 du Code électoral
Les requérants, Landry Angelo Adélakoun, Romaric Zinsou, Fréjus Attindoglo et Conaïde Akoudenoudjè, avaient saisi la Cour à la suite d’une déclaration du DGE, tenue lors d’une séance de travail entre la CENA et les députés. Le responsable électoral aurait affirmé que « si l’on peut voter pour soi, l’on peut s’auto-parrainer », une phrase qui a suscité une vague d’interrogations dans l’opinion publique à l’approche des élections générales de 2026.
Les requérants estiment que ces propos constituent une violation de l’article 132 nouveau du Code électoral, modifié par la loi n°2024-13 du 15 mars 2024. Cet article précise qu’aucun candidat à la présidentielle ne peut se présenter sans obtenir le parrainage d’au moins 15 % des députés et/ou des maires, provenant d’au moins trois cinquièmes des circonscriptions électorales législatives.
Selon leurs calculs, chaque duo présidentiel doit réunir au moins 28 parrainages. Or, le parti Les Démocrates disposant précisément de 28 députés, toute tentative d’autoparrainage par l’un de ses élus créerait un déséquilibre dans le processus de parrainage.
Pour les auteurs du recours, l’esprit du texte est clair : « le parrainage doit émaner d’un tiers et non du candidat lui-même ». Ils ajoutent que si le législateur avait voulu permettre l’autoparrainage, il l’aurait expressément mentionné dans la loi. En confondant, selon eux, le vote, qui est un acte individuel, et le parrainage, qui est un acte de cautionnement politique, le DGE aurait outrepassé ses prérogatives.
La Cour tranche : un recours irrecevable
Après examen, la Cour constitutionnelle, présidée par Cossi Dorothée Sossa, a jugé que la requête ne relevait d’aucune des compétences qui lui sont conférées par la Constitution. Elle rappelle, dans sa décision, que les citoyens peuvent la saisir uniquement dans trois cas :
– en cas de violation des droits fondamentaux,
– pour le contrôle de constitutionnalité d’un texte législatif ou réglementaire,
– ou encore dans le cadre du contentieux électoral.
Or, selon la haute juridiction, les plaignants ne contestaient ni une décision administrative ni une loi promulguée, mais cherchaient plutôt à obtenir une interprétation de la position du DGE. Un tel recours s’apparente, selon la Cour, à une demande d’avis, procédure qui n’existe pas dans le droit constitutionnel béninois.
Dans ces conditions, la Cour a conclu que le recours était irrecevable. La décision sera notifiée aux plaignants, à la CENA, au DGE et publiée au Journal officiel de la République du Bénin.
Un débat juridique toujours ouvert
Si le recours est clos sur le plan judiciaire, la question de l’autoparrainage reste au cœur du débat politique et juridique. Pour certains juristes, la déclaration du DGE, bien que discutable, ne constitue pas une violation du Code électoral, car ce dernier ne mentionne pas explicitement une interdiction d’autoparrainage. D’autres estiment, au contraire, que la philosophie du parrainage repose sur la légitimité conférée par d’autres élus, et non sur l’auto-désignation.
Alors que la période de dépôt des candidatures pour la présidentielle de 2026 bat son plein, cette affaire révèle les zones d’ombre persistantes du cadre électoral béninois et la nécessité, pour le législateur, de clarifier les règles afin d’éviter toute confusion future.